jeudi 5 avril 2012

Un paradoxe de spectateur



Toujours à la poursuite d'un retard irrattrapable, le magazine Mad Movies n'a pas encore placé son numéro d'avril en kiosques. Profitons-en pour revenir sur le numéro de mars, non pas pour en louer le très recommandable contenu (une belle tirade sur Bellflower et une interview de Joel Schumacher qui s'avère passionnante) mais pour évoquer in extremis le DVD Mad du mois qui nous plonge dans des abîmes de perplexité.
D'un côté, on ne remerciera.jamais assez la revue et l'éditeur Filmedia d'avoir enfin sorti le film en version originale sous-titrée en français, vu qu'Angoisse n'existait pour l'instant qu'à l'étranger, à moins que, comme moi, vous chérissiez votre vieille VHS avec sa VF pourrie, faute de mieux.
De l'autre, cette sortie est absurde...




C'est un secret de polichinelle mais ATTENTION SPOILER !!! quand-même : le film de Bigas Luna commence comme un slasher crapoteux et dérangeant à souhait. Puis, à la vingtième minute,quand le spectateur est bien plongé dans les obsessions fétichistes du collecteur d'yeux, la caméra descend dans la salle de ciné : nous découvrons alors que nous regardons un film dans le film. que des personnages sont eux-mêmes spectateurs et regardent depuis le début la même chose que nous. C'est alors qu'un tueur dans la salle de cinéma imite celui du film qu'ils regardent.

Inutile de revenir sur cette idée géniale et sur le talent avec lequel Bigas Luna conduit son affaire.
Mais pour avoir vu Angustia à sa sortie dans une salle pleine, un après-midi de "fête du cinéma",  je suis convaincu que dans ce cas précis aucun dispositif de projection domestique, aussi performant soit-il, ne peut être à la hauteur. Ils étaient nombreux, ce jour-là, à regarder par-dessus leurs épaules pour être bien sûr que ce qui se passait dans le film n'était pas en train d'arriver dans la vraie vie. Je le sais : j'étais assis au fond et tout le monde me regardait d'un sale œil...
La consommation des films est évidemment en train de changer, mais certaines œuvres ne sont tout simplement pas adaptables à ces nouvelles habitudes. Bien entendu, tout ceci ne m'a pas empêché d'acheter le magazine avec le DVD et de garder ma vieille VHS. Mais je me demande encore comment retrouver, et surtout faire partager, ces sensations du spectateur qui s'agitait sur son siège et regardait son voisin avec méfiance, dans la grande salle du Royal à Montpellier, au printemps 1989.

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